Par Luc Lacourcière
Selon François Colbert, le positionnement marketing représente « la place occupée dans l’esprit du consommateur par une entreprise ou son produit » (Colbert . 2014, p.133.). Ce positionnement opère à deux niveaux, le positionnement perçu (ce que les consommateurs pensent de l’entreprise) et le positionnement souhaité (la manière dont l’entreprise voudrait être perçue). Lorsque c’est deux éléments ne concordent pas, les entreprises, en règle générale, procèdent à un repositionnement marketing (Colbert . 2014, p.137), c’est-à-dire qu’elles tentent de changer la perception que les consommateurs ont par rapport à leur entreprise comme tel ou leur produit. Cette situation fut récemment vécue par la Maison des Arts Desjardins de Drummondville.
En effet, lors des années récentes, la Maison des Arts de Drummondville a drastiquement changé son image, notamment grâce à une nouvelle directrice générale et artistique : Marie-Pierre Simoneau. En effet, avec l’appui de la municipalité, Mme Simoneau entreprit d’analyser les changements démographiques dans la région pour s’apercevoir que la segmentation de son marché avait énormément changé. En effet, le segment démographique qui composait la vaste majorité des consommateurs à la Maison des Arts était déterminée par l’âge : c ‘était les baby boomers. Ce segment appréciait le style « musée des beaux arts » classique qui faisait auparavant la marque de commerce de cette entreprise. Par contre, lors de l’analyse des statistiques démographiques, Marie-Pierre et son équipe s’aperçurent que cette population était en déclin et qu’un nouveau segment l’avait rejoint en terme de volume : les 18-25 ans. Cependant, ces derniers étaient également la tranche d’âge la moins susceptible d’entrer à la Maison des Arts. Ainsi, pour veiller à la pérennité de cet établissement, Mme Simoneau et son administration décidèrent d’effectuer un repositionnement majeur. La programmation de la Maison changea drastiquement pour attirer les membres de ce nouveau segment sous-exploité. Mme Simoneau ouvrit les portes à des artistes plus modernes et entreprit d’organiser des évènements plus spécifiques pour attirer les 18-25 ans, notamment des évènements en plein air et des spectacles de musique populaire (R&B, hip-hop, etc.).
D’après ce que rapporte la directrice générale, ces changements furent peu appréciés par les anciens habitués de la Maison des Arts. Ce travail de repositionnement, cette évolution vers la modernité, ne fut pas sans embûches, mais il était nécessaire à la survie de la Maison des Arts Desjardins. Étant donné que la population des baby-boomers est en déclin, ils ne répondront éventuellement plus à deux éléments centraux dans l’établissement d’un segment : la rentabilité et la stabilité dans le temps. Par contre, Mme Simoneau ne voulait pas non plus aliéner ce segment. Ainsi, c’est un équilibre entre la tradition et l’évolution qu’elle devait atteindre. De ce fait, Marie-Pierre Simoneau eut à effectuer une diversification des segments de consommateurs qu’ils tentaient d’attirer et a du entièrement refaire l’image que les 18-25 ans se faisaient de la Maison des Arts Desjardins de Drummondville, sans non plus détruire celle que se faisaient les baby boomers. Aux dires de la directrice générale c’est chose faite. La Maison des Arts Desjardins de Drummondville est dans la meilleure situation financière de son histoire et est maintenant citée en exemple par le CALQ en termes de succès par rapport au repositionnement marketing.
François Colbert (2014). “La segmentation et le positionnement” dans Le marketing des arts et de la culture 4e édition, Montréal, Chenelière Éducation, p. 123-142.
Marie-Pierre Simoneau (2020). Conférence aux HEC dans le cadre du cours Le Management des Entreprises Culturelles. 30 janvier 2020.